27 mai 2025 : meurtre sur les planches à la salle des fêtes du lycée Jeanne d’Albret

Le coupable est dans la salle.

 

Ce mardi 27 mai 2025, à 20h, sur la scène du lycée Jeanne d’Albret à Saint-Germain-en-Laye, l’acteur Raoul est mort. Il jouait avec les comédiens Josie et son mari Antoine et est décédé d’un arrêt cardiaque. La police est immédiatement intervenue et personne n’a été autorisé à sortir.

Le coupable est dans la salle.

Cette pièce policière écrite par Yvon Taburet brise tous les murs du théâtre pour interagir avec son public et le faire rire. Ce dernier est un membre à part entière de la représentation. Les spectateurs assistent à deux pièces : l’une est celle du meurtre et l’autre, imbriquée dans la première, est un vaudeville raté qui met en scène un couple aisé joué par Josie (Noémie Merabet, HK) et Antoine (Chloé Van Der Mye, ECG deuxième année). Monsieur est avocat et est fait cocu par sa femme qui fréquente un séducteur, joué par Raoul (Clara Alba Sanchez, ECG deuxième année). Mais alors que leur liaison est découverte, le corps sans vie de Raoul s’étale sur les planches. C’est au tour de la police d’intervenir et les pistes sont malheureusement nombreuses : les membres de la troupe n’éprouvent que suspicion et animosité les uns envers les autres et Raoul était entouré d’ennemis. Du metteur en scène Jacquelin (Yannis Mohamedi, HK) qui ne raisonne que par l’argent et qui ferait tout pour un peu de publicité, au public infiltré par des comédiens, tout le monde est suspect.

Cependant, à la place de l’atmosphère pesante qui aurait dû régner, les rires ont empli la salle. Du ton des répliques aux répliques elles-mêmes, complètement décalées parfois, tout était matière à plaisanterie. La mort de Raoul, événement pourtant grave et déclencheur de toute l’enquête, a été tournée en ridicule par la réaction de ses collègues. Certains, loin d’être alarmés, ont déplacé son corps parce que tout cela « ne faisait pas riche », surtout qu’un événement comme ça, « c’était la première fois que ça arrivait ». L’entracte aussi était centré autour d’un meurtre, celui supposé de Molière. Écrit par Lucie Colin Le Cœur (metteuse en scène et professeure de théâtre), il tournait à la farce la mort de ce dramaturge très respecté – un petit clin d’œil à ce dernier sans doute puisqu’il avait lui-même fait jouer une farce lors de l’entracte de sa première représentation devant le roi Louis XIV que la tragédie jouée ennuyait.

Le coupable est dans la salle, sous l’humour de surface, dévoile, grâce à une pièce de théâtre, ce qu’est le théâtre. Que se passe-t-il derrière le rideau une fois fermé ? Comment les comédiens ou le metteur en scène appréhendent-ils leurs métiers respectifs ? Qui sont les comédiens quand ils retirent leurs costumes et quittent leurs rôles ? La réponse est à la fois simple et infiniment complexe : ce sont des humains, avec des histoires, des liens et des sentiments. Parfois leurs vies se rapprochent de celles des personnages qu’ils interprètent, d’autres ont une tout autre personnalité. Comme l’a annoncé la maquilleuse de la troupe, Nina (Hortense Gambert, ECG première année), son métier fait le pont entre la fiction de la scène et la réalité de tous les jours. Mais durant cette enquête, tout s’emmêle. Plusieurs couches de fiction se superposent pour amener à se poser la question sur ce qui est réellement vrai. Même le public est partie intégrante du spectacle ! L’inspecteur de police (Mélanie Loiseau, KH) dit qu’une fois sur scène, « le jeu vient très facilement », qu’on « s’y fait vite ». Tout le monde peut alors devenir comédien du moment qu’il monte sur les planches. Mais à quel point chacun est-il le comédien de sa propre vie ?

Je remercie chaleureusement les comédiens des cours de théâtre de CPGE pour cette représentation qui nous en a fait apprendre autant sur nous-mêmes que sur le théâtre, et Lucie Colin Le Cœur pour avoir monté ce projet de manière totalement bénévole.

Coline Moreau, étudiante en khâgne